Naturaliste, médecin et homme politique français. Agrégé d'histoire naturelle, il est professeur à la faculté des sciences de Paris. Député radical, il est aussi gouverneur général de l'Indo-Chine et ministre.
LANESSAN J. -L. de, La morale naturelle, Paris, Alcan, 1908.
Pose qu'il existe une relation étroite "entre la politique et la morale sociale. Or, la politique elle-même est placée sous la dépendance de la morale individuelle. Dans un pays ou chaque individu serait exclusivement conduit par son égoïsme, la lutte pour la vie pourrait amener une certaine évolution ascendante des plus forts ou des plus intelligents, mais tout progrès général serait impossible. Les plus forts intellectuellement ou physiquement abuseraient impitoyablement de leurs muscles ou de leur intelligence pour exploiter les plus faibles et les moins habiles; on arriverait peut-être ainsi à l'apparition du « surhomme » de Nietzsche, mais ceux d'entre les habitants d'un tel pays qui auraient atteint le plus haut degré d'évolution ne laisseraient après eux que des ruines habitées par des esclaves et des idiots.
Le résultat serait le même si, négligeant les droits de l'individu et la nécessité de la lutte individuelle pour la réalisation du progrès, on prétendait niveler les esprits et supprimer les inégalités en courbant toutes les tètes sous le despotisme irresponsable de la collectivité. Ce n'est plus, il est vrai, au « surhomme » de Nietzsche que l'on pourrait atteindre, mais à l'avilissement de tout le corps social sous un pouvoir irresponsable et qui, étant autocratique, n'aurait aucun besoin de rien savoir en dehors des connaissances qu'exige l'emploi de la force brutale et anonyme. (p. 226-227)