Bibliographie inédite des publications françaises sur Nietzsche 1868-1940
(Laure Verbaere et Donato Longo)
LOUIS-PICARD L., "Nietzsche précurseur de Hitler", in Le Droit de vivre, 11 avril 1937, p. 2. [L.V.]
Nul n’est prophète en son pays. La plupart des grands hommes en savent quelque chose, et cet adage s’applique plus tragiquement encore au philosophe Nietzsche, dont les compatriotes « qui ont sur la conscience tous les grands cataclysmes de la civilisation », entourèrent, durant sa vie, sa pensée du plus profond mépris.
Ce furent les études d’Henry Lichtenberger et celles de Charles Andler qui contribuèrent le plus à Introduire en France cette philosophie à la fois dynamique et pessimiste (héritage de Schopenhauer) et il appartint à Emile Faguet de la vulgariser.
L’incompréhension devait poursuivre Nietzsche jusqu'après la tombe, puisque d'éminents esprits comme Julien Benda surtout et André Suarès, ne craignent pas d'affirmer que la philosophie de Nietzsche est directement responsable du national-socialisme et qu'Hitler n'est autre que le type incarné de son « surhomme ».
Courageusement, dans son livre intitulé De Nietzsche à Hitler (Ed. Fasquelle), l'érudit M. P. Nicolas, s'efforce de remettre les choses en place et de rendre au philosophe son vrai visage. Il le fait à l'aide de documents aussi nombreux que choisis et l'intérêt de son ouvrage ne se ralentit pas un instant.
Il est, en effet, hallucinant, de penser que le nain Adolph se targue d'être l'héritier direct d'un Nietzsche à la fois antichrétien et antisémite! Hallucinant aussi, de songer qu'un intellectuel aussi averti que Julien Benda (voir La Trahison des Clercs) ose l'assimiler à Sorel et Maurras, à Barrès, et, pour couronner le tout, au fou roehmantique de Nuremberg! Comme si le patriotisme politique de Barrès, le nationalisme intégral de l'Action française, et le chauvinisme hystérique du maçon en chemise brune, pouvaient être comparés, même de loin, à la pensée de Zarathoustra! (...)"