Bibliographie inédite des publications françaises sur Nietzsche 1868-1940
(Laure Verbaere et Donato Longo)
SOEUR ANNE, "Causerie de Sœur Anne. A tort et à travers", in La Liberté du Sud-Ouest, 22 mars 1934, p. 6. [L.V.]
Considère qu'une "des caractéristiques si typiquement représentative de notre époque, est la facilité avec laquelle on parle de ce qu’on ignore et cela avec une autorité plaisante".
Se moque d'une jeune lycéenne rencontrée au hasard d'un voyage: "Cette jeune personne, après avoir daigné me dire quelques mots aimables au sujet d’une réunion où j’avais pris la parole dans le village d’où nous venions, ajouta qu’elle ne saurait partager mes convictions, car elle était disciple de « Nietteche ».
Après une minute d’hésitation, l’idée me vint qu’elle voulait faire allusion au philosophe Nietzsche, et, un peu malicieusement, je lui demandais de me documenter et de me donner quelques aperçus du système.
Je ne fus pas longue à m’apercevoir qu’elle était bien embarrassée de ma question, et que certainement le disciple ne brûlait pas comme le maître « au feu de sa propre pensée ».
Encore une, voyez-vous qui parle à tort et à travers, de ce qu’elle ne sait pas. J’ajoute que ce dernier cas est beaucoup plus grave évidemment, que celui qui se borne à transposer le conquistador sur un plan qui n’est pas le sien. Ceci est superficiel, tandis que c’est l’âme profonde qui est atteinte par cette méconnaissance, non seulement des mots, mais des valeurs. Pourquoi parler de philosophes qu’on ne peut comprendre, dont les combats de la pensée sont un danger, pour ceux qui ne peuvent en saisir la véritable portée, il faut être très fort pour courir le risque de telles aventures intellectuelles. Le moindre mal qui puisse en résulter est le ridicule de discuter à tort et à travers sur ce qu’on ne sait pas.
Ainsi parla non « Zarathoustra » mais tout simplement
SŒUR ANNE."