Bibliographie inédite des publications françaises sur Nietzsche (Laure Verbaere et Donato Longo)

 

(en savoir plus)

Lucien Arréat

(1841-1922)


Philosophe français, Lucien Arréat est l'auteur de nombreux ouvrages (notamment chez Alcan: Une éducation intellectuelle, 1877, Journal d'un philosophe, 1887, La morale dans le drame, 1889) mais surtout réputé pour ses qualités de critique. A partir de 1892, il participe régulièrement à la Revue Philosophique de la France et de l'étranger.

Lire ce que Han Ryner écrit sur lui en 1904.



ARREAT Lucien, "Robert Schellwien. Max Stirner und Friedrich Nietzsche, Erscheinungen des modernen Geistes, und das Wesen des Menschen", {Analyses et comptes rendus}, in Revue Philosophique de la France et de l'étranger, tome 34, n˚9, septembre 1892, p. 331-335.

Commence en observant : "L'opuscule de M. R. S. offre un réel intérêt à cause d'abord des deux personnages qu'il met en scène, Max Stirner et Friedrich Nietzsche". Remarque : "Ces philosophes sont peu connus chez nous, malgré les richesses paradoxales et le mérite littéraire qui ont pu donner, en Allemagne, de la saveur à leurs écrits" en signalant : "Une étude, si je ne me trompe, a été pourtant consacrée à Nietzsche dans la Revue Bleue" (note 1, p. 331). Explique que l'auteur marque la place dans l'histoire de ces deux "prophètes audacieux" d'une philosophie individualiste "que lui-même représenterait à son tour, d'une autre manière, en échappant aux contradictions qu'il leur reproche" (p. 331). Résume la pensée de Stirner puis remarque : "La doctrine de Nietzsche est plus difficile à résumer. Il n'a donné que des aperçus et des aphorismes" ; ajoute en note : "Son principal ouvrage a pour titre Jenseits von Gut und Böse (Au delà du bien et du mal). J'apprends, par un article d'un journal allemand, qui lui est très indulgent, que Nietzsche a été frappé, depuis trois années bientôt, d'aliénation mentale, et demeure interné dans un asile. Il est regrettable que M. Schellwien ne nous donne pas de détails biographiques sur les deux auteurs dont il expose les idées" (note 1, page 333). Expose les idées de Nietzsche en expliquant que celui-ci "ne laisse plus debout ni vérité, ni morale, ni droit. (...) Rien n'est vrai, tout est permis. En fait de morale, il n'existe que celle des maîtres et des esclaves. (...) Ce qui porte dommage au maître, cela seul est mauvais en soi. L'élévation du type humain a été l'œuvre de la société aristocratique. Place à la "bête blonde", terrible et vaillante! L'altruisme est un mot vide de sens. Pas de pitié : endurcissez-vous" (p. 333-334). Explique que l'auteur donne raison à Stirner et conclut : "Il suffirait peut-être de parler les théories de Stirner et de Nietzsche dans une autre langue, pour faire voir ce qu'elles contiennent de juste, et en quoi elles n'ont plus aucun sens. Elles marquent une réaction nécessaire contre la tendance à l'avilissement de l'homme et au triomphe de la médiocrité, qu'on dirait parfois être la passion secrète, inavouée, du socialisme et de la démocratie" (p. 335).

 

ARREAT Lucien, "Wilhelm Weigand. Friedrich Nietzsche. Ein psychologischer Versuch", {Notices bibliographiques}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 36, n˚7, juillet 1893, p. 104-106.

Commence par remarquer qu'il a déjà eu l'occasion de parler de Nietzsche et reconnaît que Nietzsche est un "véritable écrivain" (p. 105). Expose son propre point de vue : "Mais les lueurs qui brillent dans son œuvre font peut-être mieux paraître la nuit qui enveloppait son esprit, et les voix éloquentes qui y résonnent accusent trop la confusion d'une âme tumultueuse". Remarque que c'est à peu près ce que M. Weigand dit, "à demi-mot quelquefois, avec la discrétion qu'impose une terrible infortune". Finit : "Que valent, au fond, certains nouveaux dieux que nous feignons d'adorer? A cela personne ne répond bien franchement. Les meilleurs prophètes ne voient jamais très loin dans l'avenir : c'est une excuse contre la révolution d'hier, une assurance contre celle de demain" (p. 106).

 

ARREAT Lucien, "Max Nordau. Entartung (Dégénérescence). 2e vol.", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 36, n˚12, décembre 1893, p. 660-665.

Compte rendu du deuxième volume de Max Nordau. Commentant le chapitre consacré à Nietzsche : "Quant à Nietzsche, que M. Nordau réduit à rien, j'ai eu récemment, ici, l'occasion de parler de lui. La folie apparaît dans Nietzsche dès la première heure. Ses lueurs n'éclairent pas ; les vérités, sous sa plume, se transforment en erreurs ou en sophismes. Il proclame la nécessité d'une aristocratie, voilà qui est bien. Mais le "noble" de l'avenir ne sera pas l'égotiste, le malfaiteur, la bête lâchée qu'il nous dépeint".

 

ARREAT Lucien, "Ludwig Stein. Friedrich Nietzsch's Weltanschauung und ihre Gefahren", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 37, n˚6, juin 1894, p. 682-683.

Commence en ces termes : "M. L. Stein, de l'Université de Berne, ajoute une nouvelle brochure à la littérature de Nietzche. Cette littérature devient un peu encombrante, et il ne me paraît pas que l'importance du héros la justifie. J'ai eu déjà l'occasion de dire ma pensée à cet égard. Il s'en faut, d'ailleurs, que je songe aucunement à blâmer M. L. Stein d'intervenir dans le débat et de réagir, avec son autorité, contre l'influence mauvaise d'une soi-disant philosophie du monde" (p. 682). Parce qu'il aurait souhaité un article plus vigoureux contre Nietzsche, il reproche à Stein de s'être montré trop indulgent : "M. L. Stein, qui veut être juste, se défend trop, à mon avis, d'apercevoir des traces de déséquilibrement mental dans les derniers écrits de Nietzche. Il oublie que le terrain était déjà préparé, sans doute, pour la maladie, et ne pouvait porter des fruits absolument sains. La pitié qu'inspire une cruelle infortune ne change rien à la vérité" (p. 682-683).

Concernant la meilleure attitude à adopter, il explique : "Les têtes solides se garderont toutes seules. Pour les têtes faibles, elles sont la "part du feu" : le genre de combustible n'y fait rien. Restent les vaniteux et les charlatans, qui profitent de tout pour se faire place ; il n'en manque pas, en France ou en Allemagne. Le meilleur est maintenant de les ignorer. On favorise leur jeu en les combattant" (p. 683).

 

ARREAT Lucien, "Maurice Pujo. L'idéalisme intégral. Le règne de la grâce", {II. - Morale}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 39, n˚6, juin 1895, p. 652-655.

Reconnaît à Maurice Pujo "un vrai talent d'écrivain" mais remarque que "trop souvent encore sa pensée échappe, ou se divise". S'exclame : "Que de choses difficiles à accorder dans la doctrine de M. Pujo! Comment concilier le culte de la Révolution française avec la haine de la démocratie, la sympathie chrétienne avec la morale de Nietzsche, la notion de progrès avec la déchéance de l'intelligence?" (p. 652).

 

ARREAT Lucien, "Rudolf Steiner. Friedrich Nietzsche, ein Kämpfer gegen seine Zeit", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 41, n˚4, avril 1896, p. 463-464.

Eloge du livre de Rudolf Steiner qui "a su parler de Nietzsche, après beaucoup d'autres, d'une manière intéressante" et qui "a le mérite de le faire brièvement" (p. 463). Souligne la sympathie de l'auteur pour Max Stirner et pour Nietzsche, "son libre suivant, sur les écrits duquel on dispute aujourd'hui tant et trop en Allemagne". S'étonne que Steiner ne voit pas "les vices d'une doctrine qu'il expose cependant avec beaucoup de clarté". Reconnaît "le côté brillant" de Nietzsche mais insiste sur "les défauts de sa logique et l'incohérence de sa pensée" (p. 463). Conclut en remarquant : "Si M. Steiner est libre de toutes préventions, il profitera peut-être de Nietzsche mais il se gardera de le suivre à l'aveugle. L'homme selon le cœur de Nietzsche ne saurait porter le joug : humilier sa raison devant la sienne, n'est-ce pas déjà ne plus être son disciple?" (p. 463-464)

 

ARREAT Lucien, "Ferdinand Tönnies. Der Nietzsche Kultus", {II. Histoire de la philosophie moderne}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 44, n˚9, septembre 1897, p. 324.

Compte rendu élogieux : "Ce petit travail est fort bon ; il est écrit d'un style vif et clair, et semblera d'autant plus intéressant que M. Tönnies a été lui-même, de seize à vingt ans, un admirateur de ces écrits de Nietzsche devenus trop célèbres, dont il a reconnu depuis les contradictions et les dangers, qu'il signale maintenant à la jeunesse allemande. Je ne veux pas rouvrir, à propos de son opuscule, une discussion sur l'infortuné écrivain. Poète plutôt que philosophe, ésprit nullement scientifique, inconsistant et ondoyant, partagé entre les influences qu'il subit toujours quand il les nie, véritable Hamlet de la pensée moderne : tel est à peu près le Nietzsche que M. Tönnies nous rend. Il y a mieux, d'ailleurs, en ses pages, qu'une critique stérile, négative ; on y devine une pensée personnelle, une vue nette des problèmes historiques et sociaux, et c'est pourquoi j'en conseille la lecture".

 

ARREAT Lucien, "G. Zoccoli. Frederico Nietzsche", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 48, n˚8, août 1899, p. 223-224.

Expose le plan et l'objectif de l'ouvrage de Zoccoli en répétant le point de vue de l'auteur : "Les oeuvres de Nietzsche (...) fourmillent d'inconnues rationnelles, autant que sa vie fourmille d'inconnues psychologiques. La qualité de ce grand esprit malade est dans ses contradictions et dans ses révoltes mêmes" (p. 223-224). Considère pour sa part : "M. Zoccoli l'étudie de près et le juge sainement ; il le combat avec une sympathie qui ne s'abandonne point aux séductions du paradoxe, et sans manquer au respect dû à l'infortune" (p. 224).

Développe longuement : "On lira, je pense, ces pages avec intérêt. Je m'abstiendrai de les résumer ; il a été parlé de Nietzsche trop souvent ici pour que je ne craigne pas de tomber dans des redites". Ajoute pourtant aussitôt : "Je le comparerais volontiers à l'un de ces blocs erratiques, étrangers au terrain où ils viennent s'échouer, mais dont on a pu enfin établir la provenance. Les premiers géologues qui le rencontrent s'appliquent à l'étudier ; ils le soumettent à leurs procédés d'analyse, décrivent sa nature, marquent sa route et son lieu d'origine. Une fois pourtant que la roche a été exactement déterminée, le mieux est peut-être de la classer à son rang dans quelque muséum, sous une étiquette explicative, et de l'y laisser dormir".

Conclut finalement en sortant du "respect dû à l'infortune" : "Nietzsche a sucité des disciples ; il a brouillé quelques cervelles. Sa conception de l'individu fort, sa théorie d'une "morale des maîtres" opposée à celle des "esclaves", sont assez frappantes, et en partie assez justes, pour fixer l'attention et appeler la controverse. Combien, toutefois, elles paraissent vaines, quand on les presse et les pousse aux dernières conséquences! Combien surtout elles sont une arme ridicule en des mains débiles! Le Surhomme, hélas! est encore un pauvre homme qui a besoin d'une garde-malade".

 

ARREAT Lucien, "Ernst Horneffer. Nietzsches Lehre von der ewigen Wiederkunft und deren bisherige Veröffentlichung", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger tome 50, n˚9, septembre 1900, p. 314. 

 

ARREAT Lucien, "Robert Schellwien. Wille und Erkenntnis", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 50, n˚9, septembre 1900, p. 314-315.

Conseille la lecture du livre et rappelle que Schellwien "n'entend point la volonté au sens de Schopenhauer ou de Nietzsche, c'est-à-dire comme une chose métaphysique, tout "arrosée de sauce darwinienne" qu'elle est dans ce dernier" (p. 315).

 

ARREAT Lucien, "Grace Neal Dolson. The philosophy of Friedrich Nietzsche", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger tome 52, n˚9, septembre 1901, p. 330-331.

 

ARREAT Lucien, "Mgr. Dr. Engelbert Lorenz Fischer. Friedrich Nietzsche. Der "Antichrist" in der neuesten Philosophie", {Analyses et comptes rendus}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger tome 52, n˚9, septembre 1901, p. 331-332.

 

ARREAT Lucien, Dix ans de philosophie (1890-1900), Paris, Alcan, 1901, 1 vol. in-16.

Contient quelques pages sur Nietzsche.

 

ARREAT Lucien, « Isabelle, Freifrau von Ungern-Sternberg. - Nietzsche im Spiegelbilde seiner Schrift », {Analyses et comptes rendus. III. Histoire de la philosophie}, in Revue philosophique, tome 56, n˚7, juillet 1903, p. 103-106.

Compte-rendu classé dans une partie intitulée "Philosophie nietzschéenne".

 

ARREAT Louis, « Gaston Gaillard. - De l'étude des phénomènes au point de vue de leur problème particulier », {Analyses et comptes rendus. I. Théorie de la connaissance}, in Revue Philosophique de la France et de l'étranger, tome 57, n˚4, avril 1904, p. 410-413.

« M. Gaillard, en libre suivant de Nietzsche qu'il cite avec complaisance et abondance, ne se contente pas de répudier les anciennes morales, rationnelles ou formelles, qui se présentent plus ou moins, dit-il, « comme quelque chose d'extérieur à nous-mêmes et aux autres » ; mais de plus il les déclare immorales, en ce qu'elles asservissent l'individu « aux seules lois profitables et utiles à la médiocrité et au nombre ». » (p. 412)

 

ARREAT Lucien, « Ludwig Stein. - Der Sinn des Daseins. Streifzüge eines Optimisten durch die Philosophie der Gegenwart », {Analyses et comptes rendus. I. Philosophie générale}, in Revue Philosophique de la France et de l'étranger, tome 58, n˚8, août 1904, p. 179-183. [32]

Stein dénonce la pensée « des sceptiques et des nihilistes du savoir, qui nous crient en se moquant que le monde n'a point de sens. L'individualisme anarchique, le solipsisme ou égoïsme du moi, professé par Stirner et par Nietzsche, n'est à ses yeux que le retour à un fétichisme ancestral, le retour à la sauvagerie primitive et au droit du plus fort. » (p. 179)

 

ARREAT Lucien, "Remy de Gourmont. - Promenades philosophiques", {IV. - Lexicographie}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 60, n˚12, décembre 1905, p. 668-669.

Remarque : "Je ne voudrais pas passer sous silence un volume de M. de Gourmont sans le signaler à nos lecteurs. On me pardonnera pourtant de ne pas donner une analyse détaillée de celui-ci. Il me faudrait faire le tour de la philosophie, parler de Bacon, de Kant, de Spencer, de Leopardi, de Nietzsche, de l'idéalisme, du matérialisme, du pessimisme, et d'autres chose encore." (p. 668-669)

 

ARREAT Lucien, « Ernest Seillière. - La philosophie de l'Impérialisme. II. Apollon ou Dionysos. Etude critique sur Frédéric Nietzsche et l'utilitarisme impérialiste », {II. Philosophie générale}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 61, n˚5, mai 1906, p. 533-535.

Commence en remarquant: "La littérature de Nietzsche est déjà si copieuse et si encombrante qu'un écrivain de mérite n'a d'excuse, pour y ajouter encore, que la nouveauté de son propre point de vue. Tel est le cas avec l'ouvrage, très curieux et très sûrement conduit, de M. Ernest Seillière." (p. 533)

 

ARREAT Lucien, "Ludwig Stein. - Philosophische Strömungen der Gegenwart", {I. Philosophie générale}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 68, n°7, juillet 1909, p. 76-78.

 

Précise la structure de l'ouvrage de Louis Stein et signale qu'il contient un chapitre "individualisme" qui parle de Stirner et de Nietzsche "auxquels on pourrait opposer la sentence de Comte : "L'individu est une fiction comme l'atome"." (p. 77)

 

ARREAT L., "Claire Richter. Nietzsche et les théories biologiques contemporaines", in Revue philosophique de la France et de l'étranger, Année 36, juillet-décembre 1911, p. 317-318.

A propos de la thèse publiée de Claire Richter.

 

ARREAT Lucien, "Paul Carus. Nietzsche and other exponents of individualism", in Revue Philosophique de la France et de l'étranger, 39, juillet-décembre 1914, p. 460.

 

ARREAT Lucien, "H. L. Stewart. - Nietzsche and the ideals of modern Germany", {Revue critique}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, t. 41, janvier-juin 1916, p. 377-386.