Bibliographie inédite des publications françaises sur Nietzsche 1868-1940

(Laure Verbaere et Donato Longo)

 

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Portrait par Félix Vallotton
Portrait par Félix Vallotton

Louis Dumur (1863-1933)


Louis Dumur est un écrivain d'origine suisse né à Genève. Il participe à de nombreuses revues littéraires d'avant-garde. Parmi les fondateurs du Mercure de France en 1890, il publie de nombreux ouvrages à la société d'édition du même nom. 



DUMUR Louis, "Les détracteurs de Jean-Jacques Rousseau", in Mercure de France, 15 juin 1907, t. 67, n°240, p. 577-600.

A propos des "vrais Français" qui s'en prennent aux livres:

"Voyons-les. Nous négligeons Coppée, le capucin de la bande, dont l’ardeur qui s’éteint se borne maintenant à prier le cœur de Christ « qui aime les Francs ». Mais voici Lemaître, voici Faguet, voici Barrés. Voici la phalange bardée d’arguments de l'Action française, qui décide la méthode de combat et combine les plans d’attaque : voici Maurras, le paladin du duc d’Orléans, Soury, le clérical athée ; voici Lasserre, champion de l’Université, le tranchant Dimier, Montesquiou, Bainville, Corpechot; voici Vaugeois, qui a revêtu l'armure de Jeanne d’Arc et caracole devant Orléans... Ayant déclaré la guerre au XIXe siècle, ils y cherchent cependant des alliés. Bonald et Maistre sont leurs hommes. Mais ils ne leur suffisent pas. Il leur faut des figures plus impressionnantes. Ils se sont annexé le pessimisme historique de Taine et le systématisme synthétique d’Auguste Comte. Passant les frontières, malgré leur exclusivisme français et catholique,ils vont relancer Carlyle, ils se réclament volontiers de Goethe et, par un audacieux tour de passe-passe, sur lequel il serait bon de s’expliquer un jour avec eux, ils ont accaparé Nietzsche" (p. 578).

 

Cet article suivi d'une protestation de Jacques Bainville dans la Gazette de France; cf. "On défend Jean-Jacques Rousseau!", in Gazette de France, 17 juin 1907, p. 1-2.

"M. Louis Dumur reproche à l'Action française de condamner en bloc les illustrations du dix-neuvième siècle ; l'Action française pourrait prendre, selon lui, comme enseigne : Ici on assassine les grands hommes.. Michelet, Quinet, Hugo, Chateaubriand : nous les tuons tous, c’est un véritable pogrom. Seulement quelques lignes plus loin, M. Dumur nous reproche de nous « annexer » Auguste Comte et Taine, Carlyle et Gœthe. Il faudrait cependant s’entendre. Sommes-nous annexionnistes ou sommes-nous proscripteurs ? M. Dumur est prié de choisir. En attendant nous lui ferons observer qu’il nous attribue des idées de conquête qui nous sont bien étrangères. Nous n’avons jamais nommé Nietzsche un de nos maîtres. Nous nous sommes plusieurs fois expliqués sur Nietzsche. M. Louis Dumur a tort de réclamer un débat spécial sur ce nom. Et s’il avait entendu jeudi soir M. de Roux il aurait su que nous ne voulons pas plus du Nietzsche que, selon lui, nous aurions accaparé, que nous n’avons voulu du Gobineau que M. Robert Dreyfus avait prétendu nous imposer autrefois pour précurseur et pour patron." (p. 1)

 

DUMUR Louis, "Nietzsche et la culture", in Mercure de France, tome 71, n°255, 1er février 1908, p. 385-404.

Se propose d'étudier les notions de "culture" et de "Bildung" en regard des idées que Nietzsche a développées à ce sujet dans les Considérations inactuelles. Loin d'approuver Nietzsche, Dumur montre au contraire en quoi celui-ci a tort. Il s'en prend particulièrement à Nietzsche, estimant : "Nietzsche abomine le développement, il est l'ennemi de ce qui deviendra sans penser que pour être - à supposer que quelque chose soit jamais - il faut d'abord devenir." (p. 404)

 

DUMUR Louis, "Le surhomme contre Nietzsche", in Mercure de France, tome 73, n°263, 1er juin 1908, p. 399-409.

Commence par résumer : "Dans son bel article sur le Bovarysme de l'histoire, M. Jules de Gaultier, rappelant une étude que je publiais précédemment, incrimine mon appréciation de certaines partie de l'œuvre de Nietzsche et va jusqu'à m'imputer de méconnaître le véritable caractère de la pensée du philosophe du Zarathoustra." (p. 399)

Quant au différent qui l'oppose à Gaultier, Dumur se défend en trois temps. Il commence d'abord par postuler : "les interprétations peuvent et doivent être différentes suivant les prédispositions des commentateurs et selon ce qu'il cherchent ou ne cherchent pas dans Nietzsche, où il y a tout et où les opinions les plus opposées peuvent trouver tout à tour d'admirables arguments."

Dans un deuxième temps, Dumur insiste sur ce qui constitue la base de sa défense : "Je dois faire observer tout d'abord que je ne me suis nullement placé au même point de vue que M. Jules de Gaultier. Je n'ai pas écrit un article sur Nietzsche, mais sur la culture, où, à propos des Considérations inactuelles, je me proposais d'exposer quelques vues personnelles. (...) Loin de chercher à concilier Nietzsche avec lui-même, j'ai accentué consciemment ses contradictions et j'ai poussé à l'absurde ce que M. Jules de Gaultier appelle très justement ses "opinions circonstancielles", qui sont précisément celles qu'invoquent le plus volontiers les nouveaux théologiens de la culture classique." (p. 400)

Dans un troisième temps enfin, il insiste sur ce qui constitue la véritable opposition entre Gaultier et lui : "C'est qu'il y a deux Nietzsche : le philosophe et l'homme (...) Ces deux Nietzsche sont inconciliables, ou plutôt ils sont tellement différents que l'on ne doit pas chercher à les concilier." (p. 402)

 

DUMUR Louis, "Nietzsche et M. Jules de Gaultier", {Echos}, in Mercure de France, tome 75, n°269, 1er septembre 1908, p. 187-188.

Commence par une question : "Si, comme le croit M. Jules de Gaultier, il n'y a pas de contradiction entre les deux tendances manifestées par Nietzsche (...), comment se fait-il que chaque fois que Nietzsche sort du domaine des idées générales pour passer à celui des faits concrets, c'est-à-dire qu'il est amené à exposer son point de vue dans un fait d'histoire, d'art ou de sociologie, il prenne toujours parti pour le pouvoir d'arrêt et jamais pour le pouvoir d'impulsion?"

Il reste fidèle à la conception qu'il défendait quelques mois auparavant : "Nietzsche demeure donc contradictoire, malgré l'ingénieuse argumentation de M. Jules de Gaultier."

 

DUMUR LOUIS, "Nietzsche et les Allemands", in La guerre mondiale (Genève), n°124, 24/25 janvier 1915, p. 1-3.

 

DUMUR Louis, Culture française et culture allemande, Lausanne, Tarin, 1915.

Sur le sens du mot "culture", s'appuie sur Nietzsche et diverses allusions.