Bibliographie inédite des publications françaises sur Nietzsche 1868-1940 (Laure Verbaere et Donato Longo)

1868-1910: BIBLIOGRAPHIE ET COMMENTAIRES DE LAURE VERBAERE

 

(en savoir plus)

1895


Articles qui évoquent Nietzsche


REBELL Hugues, "Le maître d'école à Paris", in La Cocarde, 17 janvier 1895, p. 1-2.

 

Contre les invasions étrangères dans la littérature, contre August Strindberg. Note: "Il parait qu’il correspondit naguère avec Nietzsche. Ce fut assurément un grand honneur pour lui. Mais je crains bien, que cette intimité avec le philosophe n’ait servi qu’a rendre son esprit plus confus, sans donner à son style ces allures, vives et légères que Nietzsche prisait tant. Evidemment, l'auteur de Zarathustra pensait à Strindberg quand il faisait l’apologie de la danse et qu’il écrivait : « Il y a des esprits qui font d’incroyables efforts, pareils à des éléphants qui voudraient se tenir sur la tète. » il faut lire dans le dernier numéro de la Revue blanche l'étude de M. Strindberg sur l’infériorité des femmes. C’est une salade de noms et d'opinions, un étalage prétentieux de fausse érudition." (p. 2)

 

HURET Jules, {Petite chronique des lettres}, in Figaro, 19 janvier 1895, p. 10.

Annonce : « Trois volumes des œuvres de Nietzsche, le célèbre philosophe allemand, qui est fou, sont en cours de traduction et paraîtront prochainement à Paris. C’est M. Henri Albert qui est chargé de cette importante traduction ».

 

Anonyme, "La loi contre les menées subversives", {En Allemagne}, in La Justice, 3 février 1895, p. 1.

Signale que la Gazette de la Croix a "dénoncé comme subversives les œuvres de Frédéric Nietzsche, qu'elle traite de « fou dégoûtant »".

 

HALLAYS André, "De l'influence des littératures étrangères", in Revue de Paris, 2, 15 février 1895, p. 874-894.

Favorable au cosmopolitisme, Hallays rappelle qu'historiquement, la France a toujours subi l'influence de littératures étrangères et que, plus récemment, elle a accueilli successivement Tolstoï, Wagner, les Scandinaves puis enfin Nietzsche (p. 877). Evoque l'enthousiasme avec lequel fut accueillie la "théorie du super-homme" et raconte comment "Nietzsche a trouvé des disciples dans une jeunesse écœurée de démocratie à qui il prêchait l'orgueil et le paganisme" (p. 883). Evoque les origines polonaises de Nietzsche et précise que le "nietzschianisme" s'est en premier lieu répandu en Scandinavie (p. 887 et 888).

 

ALBERT Henri, "Sanctus Diabolus, Maerchen und Reime, par Georges Fuchs", {Les livres}, in Mercure de France, tome 13, n˚63, mars 1895, p. 368-369. [1]

Rapporte que Fuchs prétend que "lui et ses amis "devinrent ce qu'ils sont" sans connaître Nietzsche. A lire certaines pièces de son volume, il serait permis de mettre cette assertion sérieusement en doute".

 

BEAUBOURG Maurice, "Union des Trois Aristocraties, par Hugues Rebell", {Les livres}, in Mercure de France, tome 13, n˚63, mars 1895, p. 364-365.

Compte-rendu. "Il y a le manifeste désir de réunir dans une même alliance la noblesse du nom, celle de l'argent et celle de la pensée : Prince de Sagan, le Petit Sucrier et Henrik Ibsen, ou mieux Frédéric Nietzsche pour choisir la pensée à laquelle s'arrête de préférence M. Rebell" (p. 364).

 

MAURRAS Charles, "La Vie intellectuelle", in La Cocarde, 7 mars 1895, p. 2.

Insiste: "Mais ces premiers français [Jules Soury, Louis Ménard] ne nous ont point seuls retenus. Nationalistes, nous avions le pouvoir d’être internationaux; nous en avons eu la passion. Justement en raison du mépris que nous inspirait à Paris le Métèque arrogant et vil, nous nous appliquions à relever ce qui paraissait d’éminent parmi les races étrangères et, par exemple, nous avons suivi d’assez près le développement de Frédéric Niestzche.

Mais toute récapitulation serait vaine. Il y a dans nos cent cinquante feuilletons une assez curieuse abondance de faits, d’idées, qui allongerait bien hors de propos cette conclusion hâtive. Je ne veux que remercier ceux chez qui nous avons appris ces faits et recueilli ces belles idées, qu'ils aient été collaborateurs conscients de notre Cocarde ou que nous les ayons fait pénétrer par la force brutale et à coup de ciseaux..."

 

 

Passage repris par Henri Clouard dans "La "Cocarde" de Barrès", in Revue critique des idées et des livres, 10 janvier 1910, p. 332-358, p. 354.

 

RUYSSEN Th., "La morale dans la philosophie allemande contemporaine. MM. de Hartmann, Wundt et Paulsen", [Etudes critiques}, in Revue de métaphysique et de morale, 1895, p. 211-230.

Parmi les études qui servent à l'étude, cite Nietzsche, Zur Genealogie der moral (p. 213).

 

ADAM Paul, "Une enquête franco-allemande. I. Réponses françaises. M. Paul Adam", in Mercure de France, tome 14, n˚64, avril 1895, p. 3-5.

Favorable à une "ligue germano-franque", Paul Adam mentionne avec satisfaction "l'accueil obtenu chez nous par Wagner, Nietzsche, M. Hauptmann et même M. Nordau" (p. 3).

 

BARRES Maurice, "Enquête franco-allemande. I. Réponses françaises. M. Maurice Barrès", in Mercure de France, tome 14, n˚64, avril 1895, p. 7-8.

"Jamais l'échange des idées n'a été interrompu entre la France et l'Allemagne, qui l'une et l'autre ont su tirer de cette collaboration un bénéfice admirable. (...) N'est-ce pas chez nous que la pensée allemande reprenait contact avec la réalité?". Barrès cite Heine et poursuit : "Schopenhauer et, me dit-on, Nietzsche ont trouvé chez nous leurs ressources d'expressions" (p. 7-8).

 

LAZARE Bernard, "Enquête franco-allemande. I. Réponses françaises. M. Bernard Lazare", in Mercure de France, tome 14, n˚64, avril 1895, p. 16-18.

Partisan des relations intellectuelles entre la France et l'Allemagne, Bernard Lazare constate que les échanges littéraires sont réciproques : "En revanche, Nietzsche, Stirner, Hegel et les grands philosophes encore, sont les éducateurs de bien des âmes françaises" (p. 16).

 

WYZEWA Téodor de, "Enquête franco-allemande. I. Réponses françaises. M. Téodor de Wyzewa", in Mercure de France, tome 14, n˚64, avril 1895, p. 30-32.

Wyzewa ne voit "aucun avantage pour la France à entretenir avec l'Allemagne des relations intellectuelles plus suivies" car l'Allemagne exerce selon lui une influence déjà suffisamment néfaste pour la pensée française. Parmi d'autres personnalités allemandes qui ont rencontré le succès à Paris, il signale : "Wagner, Nietzsche et M. Théodore Fontane nous sont désormais familiers" (p. 30).

 

IZOULET Jean, « Le suicide des démocraties », in Revue de Paris, tome 3, 1er mai 1895, p. 147-161.

Oppose la philosophie de Tolstoï qui se jette du côté de « la Foule » et celle de Nietzsche qui se rejette violemment du côté « des Elites » (p. 147).

 

LEVY-BRUHL Lucien, "La crise de la métaphysique en Allemagne", in Revue des Deux Mondes, t. 129, 15 mai 1895, p. 341-367.

Dresse un bilan. Note : "Nietzsche a été récemment l'objet d'un engouement très vif : mais la mode qui l'a porté aux nues commence déjà à l'abandonner. C'est d'ailleurs un brillant moraliste, non un métaphysicien ; et les paradoxes violents et exaspérés où il se complaît ne fournissent pas les éléments d'un système qui se tienne" (p. 342).

 

DARMESTETER Mary, « James Darmesteter », in Revue de Paris, tome 3, 15 juin 1895, p. 804-818.

Note que James Darmesteter avait une autre vision du « Messie moderne » et voulait écrire une réponse au Zarathoustra (p. 812).

 

ARREAT Lucien, "Maurice Pujo. L'idéalisme intégral. Le règne de la grâce", {II. - Morale}, in Revue philosophique de la France et de l'étranger, tome 39, n˚6, juin 1895, p. 652-655. [5]

Reconnaît à l'auteur "un vrai talent d'écrivain" mais remarque que "trop souvent encore sa pensée échappe, ou se divise". S'exclame : "Que de choses difficiles à accorder dans la doctrine de M. Pujo! Comment concilier le culte de la Révolution française avec la haine de la démocratie, la sympathie chrétienne avec la morale de Nietzsche, la notion de progrès avec la déchéance de l'intelligence?" (p. 652).

 

JHOUNEY Alber, "Harmonie messianique. Rédemption sociale", in L'Ermitage, 11, juillet, 1895, p. 1-7.

Contient trois allusions à Nietzsche. "Contre Nietzche", Jhouney maintient que la "Charité" est nécessaire (p. 2). Estime que Nietzsche a manqué de clairvoyance au sujet du christianisme (p. 3). Enfin : "J'en reviens à l'œuvre de Nietzche. Je ne désespère pas de son âme, quelque terrible que soit le germe qu'il ait donné, ou transmis, au monde, car je crois au salut de tous, infiniment de tous, après expiations proportionnelles. Mais son œuvre, malgré les reflets de Christ glorieux qui en éclairent les cimes de grandeur, doit être renversée et rejetée : la grandeur orgueilleuse et meurtrière est la montagne de Lucifer, la Jérusalem de l'Antéchrist" (p. 3).

 

SOUZA Robert de, "Un prophète, par Ray Nyst", {Les livres}, in Mercure de France, tome 15, n˚68, août 1895, p. 236-246. [8]

Robert de Souza résume le livre : "La justice et la vertu n'existent pas. Il n'y a que la force et la victoire. Pour toute existence, tel est donc l'idéal : vaincre et régner. (...)". Il ajoute aussitôt : "Je ne sais si Nietzsche eût été content de cette interprétation" et conclut un peu plus loin : "Le lyrisme joue quelquefois de mauvais tours à la philosophie et la transforme en salade japonaise" (p. 243-244).

  

Anonyme, {Variétés}, in Gazette de Lausanne, 1er août 1895, p. 3.

Note que " la mauvaise semence jetée au dix-neuvième siècle dans les esprits par le philosophe Nietzsche a poussé avec abondance dans les pays de race latine. Un « superhomme » d'origine arabe, César Borgia, s'est emparé de l'Italie et l'a courbée sous son joug. Son règne n'est heureusement pas de longue durée."

 

ALBERT Henri, {Journaux et revues}, in Mercure de France, tome 15, n˚69, septembre 1895, p. 364-374.

Compte-rendu d'une étude de Meier-Graefe sur Przybyszewski, En Route : une suite de la contribution à la psychologie de l'individu commencée "avec Ola Hansson, Nietzsche et Chopin" (p. 373-374).

 

VEBER Adrien, "Annales de l'Institut international de sociologie", {Revue des livres}, in Revue socialiste, tome 22, n˚129, septembre 1895, p. 380-384.

Compte-rendu du livre de Casimir de Krauz, La psychiatrie et la science des idées. Krauz énumère les noms de ceux que Max Nordau considère comme des dégénérés : les "haïsseurs de la foule, anarchistes égotistes, les décadents blagueurs qui ont nom Bourget, Ibsen, Barrès, Brandes, Nietzsche" (p. 381).

 

Anonyme, "Der Kampf um ein Lebensinhalt, von R. Eucken", in Revue de métaphysique et de morale, tome 3, supplément de novembre, p. 3.

Remarque que l'auteur combat le "naturalisme" c'est-à-dire la "philosophie réaliste de Nietzsche".

 

DUCHOSAL Louis, {Publications nouvelles}, in supplément du Journal de Genève du 4 novembre 1895, p. 2.

Compte-rendu de Uhland, pages choisies, traduit par André Pottier de Cyprey. Louis Duchosal note qu'"à suivre les organes de la jeune génération, on constate qu'elle prête l'oreille à ce qui se fait dans le monde et qu'elle y prend grand intérêt. II lui arrive déjà d'entraîner les anciens dans certaines marches. C'est elle qui a poussé les idées contemporaines vers les arts anglais et allemands.

C'est elle qui a introduit Ibsen qu'aujourd'hui personne ne peut ignorer ; elle a naturalisé Hauptmann, Sudermann, et Nietzsche, que la Revue des Deux Mondes vient de présenter à son public, arrive tout droit des petites revues qui depuis longtemps le commentent et le traduisent."

 

BARBUSSE Henri, « Les poètes », {Notes d’art}, Aurore parisienne illustrée, n°1, 20 novembre 1895, p. 5-6.

A propos de la tâche du critique, cite Nietzsche : « Je n’aime que ce qui est écrit avec le sang » (p. 6).

 

PFISTER Ch., « Henri Lichtenberger. – Histoire de la langue allemande », in Annales de l’Est, 9e année, 1895, p. 344-348.

Conclut en signalant un article de Henri Lichtenberger sur Stirner dans la Nouvelle Revue du 15 juillet 1894. Note que l’article montre bien comment les idées de Stirner sont redevenues d’actualité récemment reprises par les « théoriciens de l’anarchisme et des littérateurs avancés comme Nietzsche (p . 348).